Douze heures en montagne, ou Les trois S

Ou encore: A Tondu, Tondu et demi !!

Hé oui les ami(e)s, une journée en montagne, ça libère l'inspiration !

Alors pour "Les trois S", j'ai d'abord pensé à Solitude, Ski, et ... Sagesse (c'est dans l'air du temps !!). Mais j'en ai d'autres dans ma musette: Satisfaction (mais bien une vraie satisfaction, à l'inverse de la chanson des Stones dont le titre complet était d'ailleurs "I can't get no satisfaction"), et puis Sécurité, et enfin Souvenirs.

Alors voilà, l'idée de départ consistait à tourner autour du Mt Tondu. Une ballade chargée de souvenirs puisque nous l'avions déjà faite, Seb et moi, en juin 2012 (bientôt 7 ans déjà), à l'époque nous nous entraînions pour le Mt Blanc ! Nous étions partis du parking des Lanchettes à 1950 m d'altitude, où j'avais passé la nuit dans le fourgon. Bref c'était l'équipée sauvage !!!

Aujourd'hui je pars de Notre Dame de la Gorge soit 750 m plus bas. Je prévois de monter par La Balme, les Lacs Jovet, Col d'Enclave, puis descente sur le parking des Lanchettes par des pentes déjà empruntées le week-end dernier mais dans l'autre sens. De là, montée au col du Tondu. Et c'est là que va se trouver la première difficulté du jour: le col du Tondu, c'est un passage rocheux, une bonne vire monte en diagonale vers la gauche et permet de gravir ce petit mur. Vous verrez Seb au départ de cette vire, sur les photos de 2012 ! Problème: nous sommes fin mars et ce col se trouve à près de 2900 m, et même s'il n'y a plus de saisons ma bonne dame, je me demande si je vais y trouver de la neige, de la glace, du rocher propre et sec ??? L'espoir faisant vivre, qui vivra verra, alea jacta est et les dés furent jetés. Piolet et crampons sur et dans le sac, me voilà donc parti, à 6h15 du parking de Notre Dame de la Gorge. La montée est longue, je la connais par cœur, pour "faire passer" le plat de la Rollaz, les premiers rayons du soleil viennent réchauffer les Roches Rouges puis les Roches Franches. Plus loin, c'est le Plan Jovet qui est vite avalé. S'ensuit une longue traversée au-dessus du Lac Jovet, rendue délicate par la neige dure, mais le grip est très correct. Au pied du col d'Enclave, je trouve une neige relativement préservée du soleil et du vent: certes très tassée et densifiée mais elle permet d'avancer sans craindre une "zipette". Les conversions s'enchaînent et progressivement la pente se redresse. Je quitte les skis et chausse les crampons. 150 m tout droit dans la pente: une éternité que je n'avais pas fait ça !! 9h40, sortie au col, 2672 m: le soleil, pas de vent. Ravitaillement, photos (avec le téléphone, hé oui la batterie de l'appareil photo est à plat !). Descente: neige dégelée juste à point, petits virages enchaînés sur de la belle moquette bien douce. Je croise ma trace de montée qui date de 5 jours en arrière, plus une autre trace ! L'endroit est tout de même assez sauvage et le paysage fait son petit effet: deux cirques en demi-lune sont en quelque sorte "superposés" et contrastent avec les dents de scie dessinées par les crêtes rocheuses, notamment du côté du col de la Grande Écaille: le cirque le plus haut, celui du col, entièrement blanc, domine un petit lac (en été), le second, plus bas, laisse apparaître quelques rochers, et à son pied s'étire le replat de la combe de Bellaval, avec ses chalets d'alpage enfouis sous la neige, à 2100 m d'altitude.

L'ambiance fait remonter quelques souvenirs ... des images du film des "Bronzés", mais aussi des souvenirs de certaines vacances d'hiver lorsque j'étais gamin.

Aux gué des Lanchettes, je remets les peaux. Au rayon des souvenirs, je revisite aussi une superbe randonnée avec Seb au Dôme de neige de l'Aiguille des Glaciers, c'était le 20 juin 2008 (les photos d'époque de Seb ici, et les miennes sur skitour).

Un fort vent descend du col de la Seigne. Et c'est reparti pour 900 m de D+. Une montée pas très rapide, en essayant de passer au plus court, mais pas au plus facile (avec des traversées en dévers et même une courte re-descente vers 2450 m ... et me voici au pied du col à 12h50 ! La vire est sèche (soulagement) et il y a des traces de ski, le passage a donc été pratiqué récemment. Mais je vois une plaque de neige mal placée, juste avant le col. Dix mètres de long pas plus. Une vingtaine de pas. Vraiment pas grand chose. Mais potentiellement dix mètres de trop. Il y a aussi cette corniche, qui prend le soleil depuis un bon moment. J'entends un ou deux cailloux qui ricochent sur le rocher. Tout ça n'est pas très accueillant. A l'inverse, un couloir de neige me tend les bras, juste à droite, il débouche sur l'arête des Lanchettes, à quelques encâblures (500 m max.) du col du Tondu. Avec un peu de chance je vais pouvoir contourner la difficulté. 150 m en crampons en plein soleil ! 30 minutes et sans doute un gros demi-litre de sueur plus tard, me voilà sur la crête des Lanchettes. Le point positif (car il faut toujours positiver !!), c'est que la situation est franche: hésitations et tergiversations sont vaines et inutiles: arête mixte (neige et rocher) dominant une pente tout aussi mixte qui plonge sur le glacier du Tondu 200 m plus bas, je soupçonne la présence d'une barre rocheuse et il n'est pas impossible que la neige soit plaquée (= instable voire avalancheuse). Je n'aime pas. Je n'aime pas du tout. Un petit coup d'œil tout de même au glacier du Tondu: il est tracé. Je distingue même deux traces: l'une raide, et l'autre très raide, bien visibles. Pas besoin de lunettes non plus pour voir, juste en dessous de la trace, la grande surface toute grise: de la belle glace d'hiver au coefficient de glisse de 100 %. Quand à l'arête que nous avions remontée avec Seb, elle est très mal enneigée, et impraticable elle aussi. Je suis à 1,100 km à vol d'oiseau de la "porte de sortie" du glacier du Tondu (près de la Pyramide Chaplan), mais c'est un kilomètre beaucoup trop compliqué et dangereux pour moi, à cette heure de la journée. Je tire donc une croix sur la "sortie par le haut" et sur le Pain de Sucre du Tondu.

Donc par le haut c'est "Niet - Nada", et par le bas ? Je distingue trois petits points en mouvement sur le bas du glacier de Tré la Tête, au niveau de feu ce qui fut jadis les séracs de Tré La Grande. Ils se dirigent vers le "Mauvais Pas", il est 13h40, ça chauffe bien et il reste de bons paquets de neige à descendre. Bon, je croise les doigts pour eux.

Bien. Et maintenant ???

- Qu'est ce qu'on fait ?

- On continue la mission !!

 

Bon alors donc, action ! On ne stabule pas. On tasse un peu la neige pour pouvoir chausser les skis sans trop risquer d'en envoyer un en bas (par maladresse, car la maladresse ça existe et c'est bien d'en avoir conscience). En effet, c'est un truc à éviter car au cas particulier "en bas" ça signifie 1000 mètres plus bas. Et pour descendre j'ai BESOIN de mes DEUX skis !

Bien. Une fois équipé, le bob rangé dans le sac, me voici ... en haut d'un couloir ! Et là aussi ... la dernière fois que j'ai skié un couloir, c'était ... en 2009 ? en 2010 ?? Et pourtant j'en ai descendu un certain nombre, et des plus pentus. Bon, pas d'affolement, je le sais, c'est le premier virage qui compte. Et finalement, il n'est pas si difficile, même si les chaussures étroites montées sur les skis larges compliquent un peu le dosage de la prise de carres. Bon bref, en 10-12 virages le couloir est plié, et 15 minutes plus tard je suis de retour au gué des Lanchettes.

Le plan (sans accroc) c'est de refaire le plein d'eau dans le ruisseau de fonte. Ça c'est facile: à la Coluche (un de ses touts premiers sketchs): "il met un pied dans l'eau ... il met deux pieds dans l'eau ... et là" ... et là ... il a bien fait le plein d'eau ... dans les chaussures ! Bon, une fois la poche à eau remplie, je me suis posé sur l'herbe du talus, j'ai fait sécher les chaussettes et j'ai fini les quelques provisions qui me restaient. Et après une grosse trentaine de minutes de repos, à l'attaque pour le chemin du retour, par l'itinéraire le moins difficile et le moins dangereux: le col des Fours à 2665 m. A ce stade j'ai déjà 23 km et 2300 m de D+ dans les pattes. Et pour passer le col, il me faut encore grimper 850 m. Petit rythme et détermination. Boire régulièrement pour éviter les crampes. Vérifier de temps à autre l'absence de réseau téléphonique (j'aimerais prévenir Véronique que tout va bien, mais c'est la vallée des Chapieux, elle est sauvage et je l'adore comme ça !). La dernière combe sous la Tête sud des Fours est passée à l'ombre depuis un bon moment: la neige a déjà regelé, elle est béton. Heureusement la pente n'est pas trop forte. Et après 2h20 d'efforts, la Délivrance: le col, et le soleil. Je dépeaute en vitesse et je fonce sur le col du Bonhomme. J'appelle Véronique. Reste encore à négocier la descente, en neige béton (avantage: le plat de la Rollaz passe sans pousser sur les bâtons, presque !) et traffolée, et sans les cuisses (je n'en ai plus, on a du me les voler !!), il parait que ça fait descendre les chaussettes, mais mes Thyo Pody Air, testées brevetées et recommandées par Maud Gobert, sont restées parfaitement en place. Et malgré le bain de pieds du gué des Lanchettes, aucune ampoule, après 40 bornes et 3300 m D+.

A noter, c'est important: 5 jours avant, j'avais déjà skié les pentes du col des Fours, et du col d'Enclave. Donc sur CETTE partie là, pas de surprise, terrain connu.

LES PHOTOS DU TOUR DU TONDU DE JUIN 2012 ... ET JUIN 2008

LA TRACE GPS ET LES CHIFFRES

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